Je remercie tout d’abord Laetitia d’avoir bien voulu répondre à mes questions.
Interview réalisée le 14/12/2016.
Portrait d’auteur
Nom et Prénom et/ou pseudo d’auteur(e) :
Kermel Laetitia
Si vous deviez vous présenter en quelques lignes :
Une curiosité insatiable m’anime. Mon rêve serait de voir tous les pays, pratiquer tous les métiers, connaître toutes les époques ! Par ailleurs, je suis une vraie épicurienne : ma théorie est que le plaisir qu’on prend rayonne autour de nous et contamine tout le reste. Du bonheur à portée de main ! Et puis enfin, je suis comme les Gitanes : sans filtre. Les phrases les plus indécentes peuvent sortir de ma bouche, la spontanéité est ma marque de fabrique. Alors, forcément, il y a ceux que ça amuse, et ceux que ça blesse… mais c’est ainsi.
Quand vous étiez petit(e), vous vouliez faire quoi plus tard ?
Illustratrice, romancière ou hôtesse de l’air… Bref, je planais déjà !
Quand avez-vous commencé à écrire ? Et qu’est-ce qui (ou qui) vous en a donné envie ?
J’ai écrit des histoires dès que j’ai su aligner deux mots sur une page. Enfant, j’allais à la médiathèque le mercredi comme d’autres se rendaient à la piscine ou au conservatoire. L’imaginaire était mon chez-moi, bien plus que la réalité. Puis celle-ci a repris le dessus à l’adolescence et je n’ai plus écrit une ligne pendant des années. Une période d’expériences intenses qui m’apparaît à présent comme un temps de gestation inconscient. Car le besoin d’écrire est revenu ensuite, d’autant plus impérieux, vital, cathartique.
De quoi vous ne pourriez pas vous passer ?
De ma dose d’art au quotidien, captée dans le flux de la journée : l’harmonie d’une phrase, d’un bâtiment, d’un air, d’un vêtement, d’un parfum, d’une matière, d’un visage, d’un meuble…
Votre émission de tv favorite :
Tracks, sur Arte, car elle dissèque les côtés sombres de notre société, pour en faire apparaître tout l‘éclat.
Votre film favori :
Blade Runner, de Ridley Scott (d’ailleurs adapté d’un livre de Philip K. Dick !). Le film emblématique du Cyberpunk, un genre-charnière, en littérature aussi bien qu’au cinéma.
Justement, si un film était produit sur votre vie, qui jouerait votre rôle et pourquoi ?
Marion Cotillard, pour tous ses contrastes : son côté femme-enfant, son bouillonnement intérieur sous son calme apparent, sa force au-delà de sa fragilité, son jeu sur le fil, sa sensibilité à fleur de peau.
Votre série favorite :
The Knick, avec Clive Owen. Ou les premiers pas de la chirurgie, à New York, au début du XXème siècle. Tenant le scalpel : un homme dont le génie n’égale que la dépendance à l’héroïne. La première série d’époque tournée caméra épaule sur une bande-originale électro… archi-torturée !
Votre chanson préférée :
Nantes, par Beirut. Ce morceau porte en lui un énorme potentiel dramaturgique, il me fait complètement triper.
Votre idole :
William Morris, l’une des figures du mouvement Préraphaélite qui a vu le jour au Royaume-Uni à la fin du XIXème siècle. Un utopiste qui rêvait de remplacer les chefs d’entreprise par des artistes ! Peintre génial, il a renoué avec l’esthétique médiévale. En tant qu’architecte et designer, il a annoncé l’Art Nouveau. En qualité de poète, il est l’instigateur méconnu de l’Héroïc Fantasy. Jules Verne est une autre de mes idoles : sa vision a transcendé la révolution industrielle et trouve aujourd’hui encore un écho dans la mouvance Steampunk. De manière générale, mon admiration va aux gens capables de tout bousculer.
Quelle est la 1ère chose que vous faites en vous levant le matin ?
Prendre une douche, pour me téléporter en douceur de l’état de sommeil à celui de veille.
Quels sont vos tics ou vos manies ?
Je dévisage les gens : tenter de deviner leur vie, leurs états d’âme est ma grande passion ! Egalement, dans une conversation, je peux passer du coq à l’âne car, en une fraction de seconde, mille enchaînements d’idées se sont produits dans ma tête… La preuve !
Quelle a été votre plus grosse honte ? Et la chose le plus drôle qui vous soit arrivé(e) dernièrement ?
Il y en a trop ! Voir la réponse à la question 2 : être impulsif fait des dégâts…
Croyez-vous au destin ?
Oui, dans le sens où le destin est cet inévitable point de convergence auquel notre moi profond, et par conséquent nos agissements, nous prédestinent.
Quelle est votre phrase culte favorite ? Et votre citation favorite ?
« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait », Mark Twain. Je pense effectivement qu’un soupçon de candeur, un grain de folie sont les conditions préalables indispensables à l’aboutissement de n’importe quel projet !
Pour ce qui est de ma citation favorite, ce serait : « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles », communément attribuée à Victor Hugo qui, en fait, a plagié Corneille… A double tranchant, l’oxymore est ma figure de style préférée !
Quelle est votre plus grande qualité ? Et votre plus gros défaut ?
Mon plus gros défaut est mon émotivité, elle me paralyse dans bien des situations. Mais c’est aussi de ce trait de caractère que découle ma créativité, peut-être ma plus grande qualité.
Quel mot utilisez-vous trop souvent ?
« Trop », justement. De mon point de vue, les choses, les événements, les gens sont toujours trop nuls ou trop géniaux. Je ne connais pas la demi-mesure !
Avez-vous déjà eu un ami imaginaire ?
Je ne connais pas un enfant unique ayant grandi sans ami imaginaire. Ce double idéal après lequel on court ensuite toute sa vie et qui prend tour à tour la forme d’un(e) meilleur(e) ami(e), d’un conjoint…
Vos livres
Le livre que vous lisez actuellement :
D’après une histoire vraie, de Delphine de Vigan, qui déjoue les codes du roman en explorant magistralement la facette schizophrénique de tout écrivain, la perméabilité entre réel et fiction, le rapport viscéral à l’écriture.
Justement, si vous étiez un livre, vous seriez lequel ? Et pourquoi ?
Je ne pourrais en citer un seul sans avoir le sentiment d’en trahir des dizaines d’autres.
Ce livre-totem pourrait être La part des ténèbres, du maître Stephen King. Avec la rigueur d’un scientifique, la finesse d’un psychologue, la perversion d’un psychopathe, Stephen King fait surgir l’étrange au cœur du réel, et c’est ce qui nous terrifie. Pour moi, la référence.
Mais le livre qui me représente le mieux pourrait aussi bien être Le parfum, de Patrick Süskind, pour sa vénéneuse sensualité, Dans le jardin de l’ogre, de Leila Slimani, pour son intense brutalité, American psycho, de Bret Easton Ellis, pour son cynisme, Nouvelles sous ecstasy, de Frédéric Beigbeder, pour sa modernité, Réparer les vivants, de Maëlys de Kerangal pour son rythme effréné…
Quel est votre petit rituel pour écrire ?
Un écran, du calme, un thé.
Quel est votre livre préféré parmi les vôtres ?
L’ivresse des profondeurs, moins formaté que Le verrou, mon premier roman, et plus personnel que Débâcle, mon dernier.
Quel est votre personnage, parmi vos personnages, préféré ?
Il s’agit d’une hydre à quatre têtes : celle formée des personnalités des quatre jeunes femmes disparues dans Débâcle. J’aime le prisme dessiné par chacune de leurs failles, chacun de leurs dons.
Quel est l’endroit où vous aimeriez écrire ?
Dans un monastère, depuis une cellule donnant sur un cloître. Cela serait une belle métaphore de l’acte d’écrire, complètement réflexif, entièrement tourné vers soi.
Ou bien au contraire, abritée sous l’ombre d’un cocotier, assise sur une plage déserte, le regard portant sur l’horizon. Mais au fond, cela revient au même : il s’agit de deux contextes appelant l’infini. Deux solitudes immersives.
Duquel de vos livres aimeriez-vous qu’un grand cinéaste, style Spielberg, s’inspire pour en faire un de ses prochains films ?
Incontestablement, Le verrou. Ce premier roman a été écrit après une série de scénarios de films et de fictions radiophoniques. C’est le plus cinématographique de mes livres : une trame nerveuse le sous-tend, une bande-originale le ponctue, un montage alterné le définit. Plus que tout, ses personnages sont volontairement typés et sa construction est limpide. Y a plus qu’à s’y mettre, Steven !
Vos projets
Quels sont vos envies et projets pour l’année 2017 (et les suivantes) ?
Je sais d’ores et déjà que mon prochain livre sera le résultat d’une plus longue maturation. J’ai écrit trois romans en trois ans et je ressens désormais le besoin de prendre mon temps. J’ai aussi beaucoup plus lu de littérature dite « blanche » et je veux désormais que la forme soit à la hauteur du fond. Je désire que chaque mot choisi soit à sa place et que chaque phrase ait sa musique. L’intrigue ne me suffit plus, même si j’en connais déjà les principaux éléments. Le décor sera par exemple Paris : ses toits imbriqués, ses façades historiques qu’explore la nuit un jeune marginal, esprit invisible dans le sillage d’autres fantômes profitant également de l’obscurité pour laisser leurs messages énigmatiques sur les murs de la ville, dans la langue du street art. Il y sera également question de vis-à-vis, d’intrusion dans l’intimité de ces appartements éclairés le soir tels des écrans de télé, ni vraiment différents, ni vraiment semblables. Il y sera question des strates de l’identité urbaine.
Avez-vous prévu d’aller sur des salons (en exposant ou en visiteur) ? si oui, lesquels (pour que les lecteurs puissent prévoir de vous y retrouver)
Pas de salons en perspective, pas de dédicaces : j’ai testé pas mal de formules ces trois dernières années et je n’ai pas encore trouvé la meilleure façon de rencontrer mes lecteurs. La dédicace est passive, l’interview est réductrice, le salon trop commercial. Je crois que je suis définitivement plus à l’aise à l’écrit…
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.